Beaufort North Carolina à Norfolk Virginia

Alors que nous étions à Beaufort, mes coéquipiers m'ont donné le choix: On part par la mer et nous sauvons une journée, la durée du voyage est estimée à 44 heures. On s'attend à de la vague de 2 à 3 pieds et un peu de vent, probablement quelques orages mais rien de majeur. Ou nous prenons l'Intercoastal et on y met 3 jours. 

J'ai hésité et finalement j'ai opté pour la mer... Ce qui voulait aussi dire que nous passerions devant l'infâme Cap Hatteras. C'est ici qu'arrive le courant Jet, en direct de l'Afrique. Sa force varie, mais son courant est estimé à 4 miles nautiques à l'heure, l'équivalent du courant dans le fleuve. Il fallait donc garder une saine distance entre nous et la côte. Devant le courant Jet, les vagues s'entrechoquent. Difficile alors de les anticiper et d'ajuster l'angle du bateau.

Nous étions partis depuis 4 heures à peine, quand la cabine s'est emplie de fumée. La courroie du moteur venait de céder. Nous avons donc mis le génois (c'est un voilier après tout!) et j'ai navigué tranquillement pendant que mes coéquipiers s'affairaient à changer la dite courroie. Bref, je n'ai pas appris comment le faire... mais j'ai constaté que de ma perspective, ça n'avait pas l'air trop sorcier. Car une fois la courroie de rechange trouvée, en quelques minutes, eurêka, le moteur s'est remis à ronronner, nous avons rembobiné le génois.

Nous avons vu plusieurs poissons volants encore et des dauphins. Les dauphins semblaient à la chasse. Si bien qu'un des poissons volants qui était pourchassé par un dauphin à bien failli entrer dans le cockpit!

Mon quart de nuit était à minuit. J'ai donc pris le gouvernail quand une petite sonnette à peine perceptible a attiré mon attention. J'ai réveillé Paul qui est aussitôt venu. Il m'a alors dit l'avoir entendu auparavant et ne pas savoir de quoi il s'agissait. Inquiets de savoir si c'était le moteur nous avons réveillé André. Sa recommandation, dérouler le génois, mettre le moteur au neutre pour qu'il refroidisse. Les batteries semblaient basses. Une fois le moteur éteint, l'alarme continuait. Nous avons donc poursuivi nos recherches rassuré qu'il ne s'agissait pas du moteur, car même lorsqu'éteint depuis un moment, notre petite alerte tintait toujours. Ce n'est que vers la fin que nous nous sommes rendus compte qu'il s'agissait de l'alerte du pilote automatique qui se plaignait de ne pas recevoir de signal. Nous l'avons éteint, remis le moteur et repris notre allure. :)

Cette nuit était très noire sans lune. En effet le couvert nuageux ne laissait pas ses rayons passer. Étrange d'être dans une nuit si noir, de ne pas voir les vagues qui vous propulsent de tous bords tous côtés. Mais on s'y fait! :)

Quand j'ai repris la barre vers 4h00 du matin, tout était toujours noir. Au levant, vers 5h15, je me suis rendue compte que nous naviguions dans un épais brouillard à couper au couteau. Heureusement que les instruments fonctionnaient. Nous pouvions ainsi voir venir les bateaux qui se faisaient de plus en plus nombreux à l'approche de Norfolk.

Nous avons passé de près un premier navire de la US Marine. Un ravitailleur. Nous avons ensuite vu la gamme presque complète des navires, mais pas de porte-avions.
André qui regarde le bateau de la Navy américaine

Qui a donc baissé le chauffage? Et oui, on commence à sentir le nord...

En fin de matinée nous nous faisons hélés par les autorités du port de Norfolk. Le chenal de l'entrée est très occupé. L'entrée est donc géré par une tour de contrôle comme dans un aéroport. L'officier nous disait simplement comment négocier notre chemin et nous indiquait les gros navires qui allaient soit sortir ou entrer au même moment que nous. C'est là que nous avons appris que notre AIS (Automatic Identification System) fonctionne. En effet, de sa tour de contrôle, il pouvait voir le nom de notre bateau et le pays d'appartenance. Comme diraient mes ados : Cool! si vous allez sur le site de Marine Traffic, vous devriez voir notre position. J'ai essayé, ça ne fonctionnait pas... selon le site nous étions toujours en Caroline du Nord... :(  Selon Paul il y a d'autres sites...

Nous sommes entrés à Little Creek, pour passer la nuit à Bay Point Marina. De son cellulaire, Paul avait déjà trouvé un mécano pour nous aider à réparer notre toilette qui était en panne depuis deux jours (heureusement nous en avons deux à bord et l'autre est manuelle, ce qui ne brise pratiquement jamais!) et vider son réservoir. Nous devions également lui demander de nous réparer le pilote automatique. Et quelques conseils pour mieux boucher le hublot de notre cabine qui coulait... sur notre lit...

L'amarrage à la marina était assez particulier: un système que je n'avais jamais vu auparavant avec des pieux, de petits pontons... les photos valent milles mots. En prenant mon temps, j'ai réussi à y insérer le bateau (oui, c'est moi aux commandes pour les arivées et départs). Mais les gars ont forcé un peu... :/




Notre toilette a donné du trouble à notre mécano, mais le pilote automatique ne demandait que d'être réallumé (misère! Nous qui en avions tant besoin!) et pour le hublot il me conseilla de mettre du ruban à peintre bleu qui ne laisse pas de trace et qui est étanche à l'eau. À Québec nous verrons à une solution plus permanente.



Pendant que Paul et André terminaient des besognes, je suis donc retournée à mon magasin favori des derniers jours: Walmart! De toute façon, ayant oublié mes pantalons chauds, il me fallait au moins des jeans et des bas (aussi oubliés!). Mes randonnées en taxi (pas faciles à dénicher à Norfolk) m'ont valu d'étonnantes rencontres avec des personnages pittoresques. Le premier, genre un peu "red neck" était originaire du Maine. Son opinion des conducteurs québécois n'était pas élevée. Par ailleurs, alors qu'il était plus jeune, il avait servi un coup de poing au douanier canadien avec comme résultat qu'il ne pourra plus jamais mettre les pieds au pays. En me quittant, il me souhaita bonne chance avec Champ. "Qui est-ce?" lui demandais-je. Et lui de répondre "Le monstre marin du Lac Champlain!". Et oui, il écoute les émissions "scientifiques" du yéti en passant par un requin immense qu'on croyait disparu mais qui est bel et bien en vie. La deuxième, qui écoutait de l'opéra dans son taxi jaune, m'a raconté qu'elle aussi était allée au Walmart le jour-même et s'est affairé à me décrire et me montrer sa liste d'achat. Un bricoleuse, elle avait déniché des items pour ses anciens bricolages. 30 ans, mariée sans enfants, elle m'a en quelque sorte décrit sa vie. Je n'avais rien à dire... :)

L'économie de Norfolk dépend en grande partie de l'activité de la Marine américaine
Près du tier de la population est inscrite à la marine militaire

En soirée, nous nous sommes payés un souper sur la terre ferme. Pas que nous étions tannés de la cuisine de Paul, mais bien parce qu'André nous avait alerté au fait que la Baie de Chesapeake est réputée pour son crabe et ses crab cakes. Il nous fallait donc les essayer. Sans doute les meilleurs que j'ai jamais mangé. Beaucoup de viande de crabe, pas de grosse friture épaisse et un goût extra!

Après quoi tous sont allés dormir pour une bonne nuit de 8 heures! Quel luxe!

Paul qui surveille l'efficience de son pilote automatique. Quel luxe!
Au réveil, nous avions le lever du drapeau en chœur provenant des différents régiments qui nous entouraient. Un spectacle! Alors que nous nous apprêtions à quitter le quai pour aller faire le plein de diésel, nous apprenons qu'il n'y a plus de diésel dans le coin... Il nous a donc fallu nous rendre à une autre marina à près de 5 miles nautiques pour faire le plein. Moi je suggérait que nous en empruntions un peu à la Navy... :)  Mes coéquipiers n'ont pas voulu... 




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