Je sens que ce titre vous intrigue: un nouveau passager? Un sauveteur après une avarie en mer? Qui dit mieux?
Au risque de vous décevoir, c'est le nom d'un village en fond de baie marine. D'ailleurs, les Terre-Neuviens disent - Fr-Anne-Soué. Comme vous avez pu le constater depuis notre arrivée sur la province insulaire, la toponymie est d'origine française. Selon les lectures de Paul, François est un village ultra sympathique et magnifique accessible uniquement par bateau.
Mais nous y reviendrons, car au petit matin, c'est dans le fjord de Grey River que nous nous réveillons. Une nuit tranquille, sans vague, sans bruit, si ce n'est de celui de la chute non loin. Je suis envoutée par ce décor incroyable.
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Vue du fjord par le bras du Sud-Est avec sa brume. Quoi de mieux au petit matin? |
Nous quittons notre ancrage paradisiaque et nous nous dirigeons vers l'embouchure toujours aussi émerveillés par les rivages des deux couloirs dans lesquels nous nous engageons. Pas beaucoup de photos ici car j'étais au gouvernail. Nous avons tout de même pris le temps de nous arrêter dans une colonne d'eau assez profonde près du village pour prendre des lectures pour Ocean Networks Canada.
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Voici l'un des couloirs dans lequel nous nous engageons pour se rendre à la mer. Un "tickle" en quelque sorte |
La brume est forte, une autre journée radar et cartes électroniques s'annonce. On lève les voiles car les conditions de voile sont superbes et en prime, avec nos voiles bien blanches, nous améliorons la visibilité du bateau pour les autres navigateurs.
Environ 3 heures plus tard, la brume disparaît et apparaît une côte accidentée magnifique. En voici des exemples. Quel spectacle! En regardant ceci, on se demande toujours quels furent les événements géologiques qui ont façonné la terre et la roche de cette façon. Les glaciers et l'eau de mer bien entendu, mais encore...
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Quel décor une fois la brume levée! |
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On ne se tanne pas de regarder les rivages défiler. |
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Cap la Hune
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Creusé par les glaciers et par la force de l'eau, les côtes sont bien différentes les unes des autres. |
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Jeu de textures, de formes, végétalisées ou non. |
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Quand on regarde le détail de la côte, on dirait ici qu'elle fut montée de blocs Légo, un cisaillement sans doute causé par l'eau et le gel. |
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Et ici on dirait un trou de serrure! |
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Juste beau... j'arrivais pas à choisir, alors à quoi bon! |
On arrive à François qui est gardé sur la côte par un ancien phare fermé et abandonné, où seule la tourelle est toujours fonctionnelle, toutes les fenêtre de l'ancienne maison du gardien sont bouchées, tellement moins sympathique. On pénètre dans la longue baie et tranquillement le village et ses montagnes se révèle à nous.
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Le phare de François indique la pointe rocheuse et le bas fonds qui suit la pointe. Il y a maintenant un hélicoptère qui assure le fonctionnement de la lumière. |
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Une partie du village de François |
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Pour vous donner une idée de la hauteur, on voit ici La Grande Fugue qui entre dans la Baie de François. Les vagues s'estompent dès qu'on entre dans l'ouverture de la Baie. Photo: Marie-France Croteau |
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Arrivée de la Grande Fugue à François. Photo: Marie-France Croteau |
Le village est vraiment bâti un fond de la baie arrondie comme un amphithéâtre. C'est superbe et spectaculaire à la fois. En s'approchant, on voit des fanions de toutes les couleurs qui relient les bâtiments, c'est le Festival de François. Quelle chance d'arriver ainsi en plein festival! On se dirige vers le quai public qui est le plus à l'est de la Baie. On constate qu'il est plein, pas optimisé car des bateaux auraient pu être poussés, mais nous n'insistons pas. On nous indique que comme la saison de la pêche est terminée, il est correct de s'amarrer à un bateau de pêche. Or plusieurs chaloupes sont ainsi amarrées, probablement pour s'assurer que les visiteurs comme nous ne puissions nous y coller. On ne voit qu'un petit bateau de pêche blanc et bleu et c'est celui qui nous accueillera, m'enfin les propriétaires n'y étaient pas et le bateau était clairement en réparations majeures. Pour descendre de La Grande Fugue et toucher terre, il fallait maintenant franchir le bateau de pêche. Un exercice en soi car bien que son bord était aussi élevé que le nôtre, son plancher était beaucoup plus bas!
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Jours de fête à François, c'est le festival! |
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La Grande Fugue à droite et son nouvel ami sur sa gauche. Ce dernier est amarré sur le quai public des pêcheurs. Nous avons quand même pris la peine de passer des amarres par dessus ou autour du bateau pour être bien certains de la tenue. |
Il n'y a pas vraiment de route à François. Il y a des ruelles, encore certaines recouvertes de trottoirs de bois. Mais plusieurs trottoirs de bois ont laissé place au ciment. Car les habitants utilisent des quatre roues bruyants et malodorants. On comprends que ce soit pratique, mais on s'aperçoit vite que cela a profondément changé l'atmosphère de ce village. Les gens nous saluent à peine assis aux commandes de leur véhicules tapageurs. Oubliez les casques, personne n'en porte!
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Sur cette photo on voit le trottoir de ciment et ceux en bois, un qui va vers le haut et l'autre qui dévie à droite. |
On arpente quand même les ruelles de ce village, saluant tant qu'on le peu les habitants. On trouve l'épicerie, pas très bien ravitaillée, mais on a besoin de rien. Cependant, il y a festival, donc on demande quelle sont les activités car on ne trouve de programme nulle part. Une dame nous explique qu'il y a messe ce soir et que ce sera suivi de chansons. Demain il y aura un marché d'artisanat, de la musique Terre-Neuvienne, une course de canards en plastique et de la dans en soirée. L'église est juchée sur un des versants du village, comme le voulait la règle, le clocher est l'élément le plus haut de cette communauté.
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Une chute sépare le village en deux. Elle est aussi une source d'eau douce. |
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La Grande Fugue au premier plan recouvre plus qu'entièrement le bateau de pêche! |
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Trottoir de bois avec ses rampes |
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Quelqu'un s'est même fabriqué un écureuil. |
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Celui-ci est encore plus drôle, il a abdiqué, il nous montre son ventre! |
On se rend au quai public. Un des bateaux visiteurs est un bateau de Québec, Véritas. Un voilier ayant une seule voile que l'on appelle un Nonsuch, bateau inventé par un canadien. Il est conçu comme une planche à voile avec un arceau double ou double bôme (wishbone) autour de la grande voile. Mais ses propriétaires ne semblent pas y être. On rencontre un navigateur américain qui nous explique que les déchets doivent être transportés au petit incinérateur à environ 100m du quai que nous voyons fumer...
On regarde deux locaux qui s'obstinent avec un moteur de chaloupe rébarbatif. Malgré que nous soyons attentifs, nous ne comprenons pas un seul mot des échanges entre les deux hommes. Ils parlent anglais, mais leur accent est vraiment trop fort pour nous. :)
On continue notre exploration du village en partant en randonnée vers le sommet du village ou se trouve l'énorme réservoir d'eau naturel et un paysage à couper le souffle.
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Vu de François au niveau du réservoir d'eau naturel. La chute à nos pied est celle qui divise le village. |
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Paul suit une piste de randonnée, mais nous n'irons pas là ou ce couple (en haut à droite de Paul) s'en va! Je crois qu'il faut se tenir à une corde pour arpenter ce pic. |
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Le réservoir (en partie) entouré à son tour de hauts sommets. |
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Cette cascade aliment le réservoir, qui à son tour, se jette dans la chute qui descend au village. |
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Oh! Des bleuets!!! |
Encore un peu plus haut, un cimetière en pleine tourbière. Les tombes baignent dans ces tourbières. Comme on l'a vu au Royaume Uni, l'eau acide des tourbières et le manque d'oxygène conservent très bien les corps des sépultures. Touchant de voir la répétition des noms de familles, dont deux principales: Carter et Marsden. Certains vivaient vieux dans le temps, 74 ans en 1932, donc ayant survécu à la grippe espagnole et à la première guerre mondiale. Terre-Neuve n'était pas encore intégré au Canada et sur le bord de la faillite faisant suite à la grande Dépression. C'est d'ailleurs cette faillite qui a convaincu les Terre-Neuviens de se joindre au Canada. D'autres pierres tombales témoignaient de plusieurs enfants qui mourraient.
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Pas tellement de tombes où les gens sont morts en mer. Ce sont de bons marins! Nous avons trouvé celle-ci. |
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Détail de l'église et de sa cloche. |
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Paul après notre randonnée. |
On redescend vers le bateau. Un bateau de pêche arrive. On jase avec les pêcheurs qui blaguent avec clins d'œils qu'ils n'ont rien pêché, ils ont bien caché leurs captures. On se doute bien qu'ils ont de la morue fraiche!
On regagne notre belle Grande Fugue trop épuisés pour remonter à l'église. Paul qui voulait rester 3 jours anticipant un séjour fantastique m'annonce "On part demain matin, on a tout vu et les gens ne sont pas aussi chaleureux que dans mon livre". Et c'est ainsi que nous avons coupé court à notre séjour. Mais la suite est intéressante...
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